La tour de Babel à Dakar et des gens que l’on rencontre comme si c’était écrit de longue date
De retour de N’Gor hier soir, Khalil m’appelle pour donner des renseignements à des voyageurs qui veulent rejoindre Ziguinchor par la route, via la Gambie. Cela m’amuse de voir que Khalil, un fils de Dakar, un débrouillard qui connait tout du coin, me demande à moi de donner des renseignements… #Off2Africa 43 Dakar Sénégal
Il me présente deux Hongrois. Ils doivent avoir de 60 à 70 ans, voyagent en taxi-brousse à travers toute l’Afrique de l’Ouest et veulent impérativement traverser tous les pays, obtenir tous les tampons des postes-frontière jusqu’à leur étape finale : la Côte d’Ivoire. Le proverbe dit bien que les voyages forment la jeunesse !
Les Hongrois, qui baragouinent en anglais, tentent de se faire comprendre, mais personne ne parle suffisamment bien pour leur répondre. Il y a également deux Italiens, mais eux parlent le français et non l’anglais. Personne ne parle hongrois, évidemment. Je me lance donc dans une traduction italien-anglais et organise un transport pour les Hongrois dans le taxi-brousse des Italiens. Le départ est prévu à 20 h 00, il reste deux places dans le fond du véhicule. Ce sont les pires, pourtant les Hongrois se regardent, échangent deux mots – en hongrois – et acceptent l’offre.
Je suis absolument impressionné ! Ils ont moins d’une heure pour se préparer, leur voiture arrivera vers trois heures du matin à la frontière entre le Sénégal et la Gambie. La douane, elle, n’ouvrira officiellement qu’à sept heures (n’oublions pas la notion du temps en Afrique). Puis, ils devront traverser le fleuve en pirogue pour ensuite continuer vers Ziguinchor… Toute une aventure !
Resté seul avec les Italiens, je me mets à converser avec l’un d’entre eux. Massimo habite depuis 12 ans en Casamance. Il possède un campement en bord de mer (La Casa, à Diembering, si vous y passez) et des rizières (la culture traditionnelle de la région, le riz de Casamance est réputé). À midi, il cuisine sénégalais avec son propre riz, et le soir, italien. Il s’est graduellement fait accepter par les gens du coin, jusqu’à être invité à prendre part aux cérémonies secrètes d’initiation animiste. C’est un type fascinant, étrange, et cette rencontre brève a tout le charme des voyages au bout du monde. Je lui raconte – en italien – que je prends le ferry le lendemain pour Ziguinchor en souvenir de mon amie Sonja qui était Italienne comme ma grand-mère. Elle y était souvent allée avec sa fille, mon amie Muriel (la Mum’s, pour les intimes). Combien de repas avons-nous fait, devant le plat de pâtes traditionnel, à évoquer ce voyage et ces noms si mystérieux : Ziguinchor, Casamance… Sonja en parlait toujours avec tant de ferveur, il fallait qu’un jour, je découvre moi-même. Sonja nous a devancé trop tôt, avec l’indépendance qui la caractérisait, mais les leçons d’amour qu’elle nous a transmises sont restées. Muriel est devenue mère à son tour, aux quatre coins du monde et sur tous les océans. Elle raconte son aventure dans Le sillage des Favre en mer que je vous recommande ! Lorsque j’ai lu son livre, je n’avais aucun plan, aucun débouché à l’horizon. En le refermant sur la dernière page, je savais que je partirai en Afrique, et je suis parti.
Je foule encore un peu la belle terre de Dakar, j’écoute à nouveau de la musique, les délicats sons de la kora. À Saint-Louis, j’entendais partout Fais-moi confiance chanté par Sidiki Diabaté en langue bambara.
J’avais sans le savoir cette chanson dans ma liste ; le Mali était déjà à l’horizon…
#Off2Africa 43 Dakar Sénégal
Samedi 7 janvier 2017
Durant #Off2Africa, j’avais pour habitude de ne partager qu’une photo par jour, sans légende.
Celle du jour figure en haut de ce récit ; en voici une autre…
de ci, de là 