C’est beau l’Afrique, elle me fait du bien…
Le Pleine Lune n’avait pas encore ouvert ce matin. Ils avaient pourtant dit « dès 7 h 00 » mais c’est l’Afrique… il ne faut jamais se fier aux horaires. J’ai fait mes adieux à Taleb avant de monter dans le minibus pour Nouakchott. Un employé m’a attribué le confortable siège de devant, avant de le partager avec un vieux monsieur dont la discussion pittoresque (et incessante) avec le chauffeur a ensuite rythmé les six heures de voyage vers la capitale mauritanienne.
Dans le minibus, j’ai cru identifier un passager indien. On voit beaucoup de Chinois en Mauritanie, mais peu d’Indiens. Il portait le bracelet traditionnel rouge au poignet et a remarqué que j’en portais un aussi, mais noir. J’ai été émerveillé, bercé par les discussions à bord, inlassablement surpris par la découverte des lieux et des gens. Je me sens vraiment bien, tout seul en voyage. La route est rectiligne, le paysage du Banc d’Arguin est magnifique. Si vous n’êtes pas encore convaincu par la beauté de ce pays, mes photos vous aideront. J’en ai pris 121 en un seul jour et il a bien fallu faire un choix… L’Afrique est si vaste, je sais que je n’en verrai qu’une infime portion, alors je veux me rassasier de ces images et de ces sensations.
De plus, faire la route dans ces pays-là, c’est le moyen d’être au plus proche des habitants, d’établir avec eux un contact :
« Une fois terminée, la RN 3 va rapprocher les hommes, et un peu les continents. Cette portion mauritanienne est en effet le chaînon manquant permettant de relier par le bitume le Maroc au Sénégal, et au-delà, l’Europe à l’Afrique noire. À l’exception du passage du détroit de Gibraltar et du franchissement du fleuve Sénégal (pour remplacer le bac qui est utilisé à Rosso, la construction d’un pont est envisagée), il sera donc possible de rejoindre le Nord de l’Europe à Dakar en moins de quatre jours et exclusivement sur du goudron ! » Sur la route du désert, entre Nouakchott et Nouadhibou, Pierre Lepidi
L’épopée de Rosso, la traversée du fleuve Sénégal (non en bac, mais en pirogue pour moi), ce sera pour demain. Et quelle aventure ce fût !
Comme je ne dispose que de peu de temps à Nouakchott, je me lance au plus vite dans mon occupation favorite : d’abord un café, qui me permet de parler aux clients attablés, puis une balade souvent sans but dans les environs. Mais cette fois, j’ai prévu d’assister au coucher du soleil sur le grand marché aux poissons de la ville. Après quelques tentatives infructueuses pour trouver un taxi collectif, un gentil monsieur m’aborde et me conseille de marcher un peu plus loin. Là-bas, au carrefour BNM, des voitures m’emmèneront certainement. Cela crie dans tous les sens pour remplir au plus vite les véhicules. Nous sommes joyeusement serrés comme des sardines, à quatre derrière, mais le trajet est court. Je me retrouve à nouveau à côté d’un vieil homme qui me raconte, en souriant, ses années d’études en Europe. Nous sommes si captivés par son récit qu’il oublie de signaler son arrêt au chauffeur ! Mais c’est cela aussi l’Afrique et les voyages : peu importe le temps, ce qui compte ce sont les échanges humains.
Ces hommes (et ces femmes, surtout ces femmes) me fascinent ! Ils n’ont pas une vie facile, selon les critères occidentaux, et pourtant quelle simplicité, quelle authenticité. Nous en avons tellement à apprendre. Mais beaucoup rêvent d’émigrer en Europe… et il faut toujours faire sa propre expérience. Pourvu qu’ils y trouvent leur bonheur… et à tout le moins, j’espère qu’ils survivront à la traversée… Ce soir-là, je vois des scènes véritablement épiques, des Mères Courage sur le rivage, le regard tendu vers l’horizon chimérique. J’ai en tête les mots et la musique que j’ai souvent chantés :
« …car il faut que les femmes pleurent, et que les hommes curieux, tentent les horizons qui leurrent… »
Les berceaux, Gabriel Fauré
Je reste longtemps à contempler l’intense activité autour des embarcations chargées et déchargées sur la plage, la force et le courage des ces hommes qui prient avant de s’élancer pour une nuit de pêche sur une simple pirogue en bois, la fatigue éperdue de ceux qui reviennent, les femmes qui réceptionnent les seaux de poissons avant de les trier, de les présenter, de les vendre au plus offrant (ou au plus vite, avant que le soleil ne se couche). C’est un spectacle inoubliable que je vivrai souvent en Afrique.
Une fois n’est pas coutume, je surmonte mon aversion pour le crépuscule et je reste dehors jusqu’à la nuit tombée. Devant un de ces fameux thés à la menthe, mousseux et un peu amers comme on les aime en Mauritanie, je me répète :
Oui ! C’est beau l’Afrique, et qu’elle me fait du bien !
#Off2Africa 17 Nouadhibou – Nouakchott Mauritanie
Lundi 12 décembre 2016
Durant #Off2Africa, j’avais pour habitude de ne partager qu’une photo par jour, sans légende.
Celle du jour figure en haut de ce récit ; en voici d’autres…


































