Sur le fleuve Casamance, un homme est assis seul à l'avant d'une pirogue #Off2Africa 46 Ziguinchor Casamance Sénégal © Gilles Denizot 2017
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#Off2Africa 46 Ziguinchor Casamance Sénégal

À l’extrémité d’une pirogue, la silhouette d’un homme se détachait du gris de l’horizon, se reflétait dans le gris de l’eau


Il faut savoir s’assoir, seul et calme, au bord du fleuve. Savoir laisser les couleurs changer imperceptiblement. Laisser le temps nous bercer, nous réconforter. S’apaiser et se ressourcer, se retrouver… #Off2Africa 46 Ziguinchor Casamance

Sur le fleuve Casamance, un homme est assis seul à l'avant d'une pirogue #Off2Africa 46 Ziguinchor Casamance Sénégal © Gilles Denizot 2017

Le nom Ziguinchor viendrait, selon certaines hypothèses, du portugais sinta bou tchora ou assieds-toi et pleure, mais des pleurs, il n’y en aura pas. Il ne peut y avoir que de la sérénité, face à cette nature grande et digne. En Casamance, l’homme s’est uni à son monde, il le vénère même. L’animisme, encore très présent, reconnaît et rend aux éléments naturels leur souffle ancestral.

Chez les Joolas, le peuple autochtone le plus ancien après les Baïnunks, la vie en société se définit dans l’égalité et l’individualité. La notion de caste est absente, l’homme occupe sa place parmi ses semblables. Il ne se soumet pas aux règles de la civilisation, il choisit librement son occupation et construit lui-même sa maison dans laquelle un espace sera réservé à l’étranger. Il faut savoir choisir sa place et l’occuper, au sein du groupe.

Le Joola entretient un lien privilégié avec la terre, l’eau, et le riz que, traditionnellement, il ne vend pas, mais donne ou échange. Il est raconté que, jadis, avant qu’on ne sache faire cuire le riz, un roi de Haute-Gambie décida de marier ses deux filles jumelles prénommées Dyambon et Agen. La première fut envoyée dans le Sine et y devint la mère de la tribu Sérère. La seconde se rendit en pirogue dans la région du Fogny. Elle apporta avec elle un outil destiné à la culture du riz ; sa descendance est à l’origine des Joolas qui peuplèrent progressivement la Casamance.

Le riz est dot de mariage, trésor de voyage, cadeau de bienvenue à l’étranger : le riz est une denrée noble. Sa culture est enrichie par des engrais verts ou organiques, toujours dans le respect de la nature. Pour faire face aux « ennemis », les maladies qui pourraient nuire au riz, le Joola recourt aux prières, aux offrandes, aux gris-gris des sorciers.

Un « Dieu suprême qui se préoccupe de ce qui est bon est de ce qui est mauvais est [une idée] complètement étrangère » au Joola, expliquait Robert Baum. Car Dieu, Émitaï, est aussi connu sous le nom d’Ata sembé, la force des forces. C’est le seigneur du ciel, celui qui commande la pluie, celui qui crée le cosmos et l’ordonne. La vie quotidienne se définit et se régit par l’équilibre.

Cette journée consacrée à l’observation passive du fleuve m’a offert une quiétude indicible. Comme les Joolas le font avec le riz, j’ai troqué peine contre paix. Dans la sécheresse du Sahara, le sable blanc touchait délicatement le goudron, mais sans s’y attacher ; dans la verte Casamance, mon esprit flottait à la surface du fleuve et s’y perdait…

#Off2Africa 46 Ziguinchor Casamance
Mardi 10 janvier 2017


Durant #Off2Africa, j’avais pour habitude de ne partager qu’une photo par jour, sans légende.
Celle du jour figure en haut de ce récit ; en voici d’autres…