Rangée de palmiers, fils électriques, maison verte et un gamin sur la gauche #Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao © Gilles Denizot 2017
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#Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao

Le désir d’indépendance d’un peuple, la ferveur face à l’exploit, l’espoir qu’il suscite et une grand-mère au sommeil imperturbable


Le soleil se lève sur la Praça Che Guevara mais Bissau dort encore. J’en profite pour faire un grand tour à pied jusqu’O Bistro, Rua Eduardo Mondlane, sur les hauteurs de la ville. Il ouvre à peine, une employée lave la terrasse à grande eau et en musique. Elle s’interrompt pour me préparer un café et je m’installe sur la terrasse… #Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao

Rangée de palmiers, fils électriques, maison verte et un gamin sur la gauche #Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao © Gilles Denizot 2017

Les maisons s’éveillent sous le soleil, les ombres se projettent sur les façades colorées, les habitants reprennent possession des rues. J’ai la sensation qu’un événement important s’organise.

La Guinée-Bissau actuelle est une nation relativement jeune. L’ancienne colonie portugaise n’obtint son indépendance qu’en 1974, après la révolution des œillets et suite à une longue guerre de libération. Auparavant, entre le XVe et le XVIIIe siècle, le pays fut l’un des hauts lieux de la traite des esclaves par les Portugais. Un ancien billet de 500 Pesos relate d’ailleurs cette partie de l’histoire, alors qu’un Mémorial de l’esclavage a été inauguré à Cacheu.

#Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao
#Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao © Gilles Denizot 2017

Les guerres civiles à répétition et l’influence de l’armée dans les affaires gouvernementales retardent d’autant le progrès de la Guinée-Bissao et son accession à une démocratie prospère. Pourtant, que de lieux magnifiques : d’immenses étendues de mangrove, des plages, des îles (l’archipel des Bijagos, que je n’aurai cependant pas l’occasion de visiter) et tant de ressources naturelles. Malgré la pêche et le commerce de la noix de cajou, la pauvreté fait son travail de fond et le pays est aussi connu pour être une plaque tournante du trafic de drogue.

L’espoir d’un peuple surgit souvent lors d’occasions apparemment insignifiantes. Il ne faut parfois qu’un simple match de foot. Ce samedi, l’équipe nationale est au Gabon et participe, pour la première fois, à la Coupe d’Afrique des nations. Les joueurs étaient à la dernière place du classement, ils sont maintenant tout en haut. Bissau se prépare avec fébrilité à cette rencontre historique. Peu d’habitants possèdent une télévision (quand ce n’est pas l’accès à l’électricité), ils se rabattent donc vers les cafés, en discutant les chances de leur équipe.

Je n’ai jamais été intéressé par le football, mais l’occasion fait le larron. L’hôtel Kalliste Bissau a une terrasse agréable (idéale pour déguster le délicieux gâteau coco dont je parlais hier) et un petit poste de télévision, encastré dans une armoire. Une petite foule est déjà amassée devant, je la rejoins.

L’entraîneur des Djurtus (comme on les appelle ici), Baciro Candé, explique :

Quand nous avons quitté le pays, les gens se sont regroupés comme je ne l’ai jamais vu auparavant en Guinée-Bissau. Il y a eu un mouvement de foule énorme. Je pense que tout le pays s’est réuni à Bissau pour encourager la sélection lors du départ pour la CAN. C’est un évènement qui atteint des proportions que même la politique n’a pas réussi à faire, et ça il faut le souligner. On peut, presque, affirmer que c’est une seconde indépendance, parce qu’en ce moment ce qu’on vit ici paralyse complètement le pays. Tout le monde attend ce premier match face à l’équipe du Gabon.

Il faudra attendre la fin de la partie pour que le Gabon concède le nul face à la Guinée-Bissao. Les spectateurs sont époustouflés de voir que leur pays a relevé ce premier défi international. Immédiatement, des voitures surchargées de jeunes tournent autour de la Praça Che Guevara dans un grand carnaval de drapeaux, de klaxons et de cris de victoire. Aujourd’hui, le nul n’est pas une défaite, mais le signe d’un possible renouveau.

Le soleil couchant siffle la fin d’un jour pas comme les autres pour la Guinée-Bissau ; la grand-mère assoupie sur la terrasse continue de sommeiller…

#Off2África 50 Bissau Guinée-Bissao
Samedi 14 janvier 2017


Durant #Off2Africa, j’avais pour habitude de ne partager qu’une photo par jour, sans légende.
Celle du jour figure en haut de ce récit ; en voici d’autres…