Une pirogue amarrée sous un arbre au bord d'un cours d'eau #Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée © Gilles Denizot 2017
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#Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée

Les aventuriers français n’attaquent plus pour explorer la Guinée forestière, ils enfourchent des motos, traversent des rivières en pirogue et à pied


Réveil à l’aube pour le voyage en direction de Conakry. Je vais au garage avec le groupe rencontré à mon arrivée à Bissau. Ils ont décidé d’entrer en Guinée par la route de Gabu, Kandara et Labe. Quant à moi, j’ai choisi le chemin le plus difficile, via Kundabani, Quebo et Boké, à moto et en pirogue, à travers forêts et rivières… #Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée

Une pirogue amarrée sous un arbre au bord d'un cours d'eau #Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée © Gilles Denizot 2017

Les rues de Bissau sont totalement désertes. Mohamed (le Français du groupe, un sacré baroudeur celui-là et un très chic type) m’emmène à la boulangerie du coin. Dire que je n’ai jamais découvert l’endroit ! Leurs croissants et leurs pains au chocolat sont à se damner et nous nous régalons, assis sur le trottoir en discutant avec les employés. Les Allemands trépignent, il faut trouver un taxi, il faut aller au plus vite au garage pour trouver une voiture. Les Français que nous sommes n’auront aucune chance de profiter du moment. Je regrette de ne pas faire la route avec Mohamed, car il est fiable, calme, ouvert aux gens et aux expériences du voyage. Mais ce sera peut-être partie remise…

Le trajet Bissau – Conakry est annoncé comme une galère et je m’attends à tout. Rétrospectivement, c’était moins désagréable que le passage de la frontière à Rosso ; difficile physiquement, mais l’effort en valait la peine ! Des étapes de voyage comme celles-là vous font gagner vos galons d’aventurier. Qu’il est loin le temps où j’étais réticent à prendre le bus ou le train en Inde…

Abdoulaye Barry écrit dans son blog Conakry – Bissau : 30 heures pour 800 km (je cite tel quel) : « Parcourir les quelque 800 km qui séparent Conakry de Bissau (en passant par Boké) vous devez compter 24 heures au meilleur des cas, sinon, vous êtes parti pour deux ou trois jours de calvaire dans des véhicules où tout confort est bannie. » [sic]

J’ai fait cette route en un peu plus de 12 heures, en voyageant entre l’aube et la nuit tombée, malgré un pneu crevé à l’entrée de Conakry. Mais assurément, c’est une aventure que je vous raconterai en trois parties : de Bissau à Boké d’abord, ensuite Boffa, puis Conakry.

En 2012, des anglophones semblaient avoir vécu difficilement leur périple entre Bissau et Conakry, via Gabu, Kundara et Labe. Ils en parlaient sur Lonely Planet et j’avais lu leur témoignage ainsi que toutes les informations disponibles. Vous pouvez toujours demander autant que vous voulez autour de vous, il faudra bien vous rendre compte. J’ai eu beaucoup de chance sur le parcours, ai rencontré des gens aimables prêts à m’aider (merci à Luis, Mori, Djao) et suis arrivé à bon port en un temps record.

Au garage de Bissau, je trouve immédiatement un taxi-brousse pour Quebo. Les chauffeurs s’affairent autour du moteur, une vision peu rassurante au petit matin, mais que tous les voyageurs en Afrique de l’Ouest connaissent. La route est relativement bonne, je m’endors rapidement pour prendre des forces, car la suite du voyage est à moto…

Arrivé à Kundabani (juste avant Quebo, ce qui me fait gagner du temps), je rencontre les motards qui font la traversée de la forêt et le passage de la frontière avec la Guinée. C’est l’heure de manger et je suis invité à partager le plat commun. Les bécanes en ont vu de toutes les couleurs et elles sont nettement moins confortables que ma Royal Enfield Thunderbird, restée en Inde. Je suis pourtant bien enthousiasmé à l’idée de découvrir du pays à moto et de traverser les fleuves en pirogue. Un casque sur la tête, mon sac bien attaché et en route !

La route, justement, est au mieux une piste, plus souvent un sillon creusé entre les arbres par les pluies diluviennes. À la mi-janvier, la route costale peut encore être inondée et devient alors impraticable. Les petits cours d’eau se transforment en rivières et empêchent le passage des véhicules ; il faudrait se replier sur le centre du pays. Le soleil a déjà bien asséché le terrain, mais il subsistera encore assez de boue pour maculer les motos et les hommes. Nous traversons de multiples points de contrôle, en pleine brousse. Là se languissent des soldats sur des hamacs ou dans des cases, toujours à l’affût pour débusquer le toubab. Seulement, le toubab en a vu d’autres et il se joue de toutes les inspections avec le sourire. Cela doit quand même les impressionner de voir que j’ai choisi la moto plutôt que l’avion.

Peu après avoir fait tamponner mon passeport, j’arrive à la rivière Kogon (dans la région de Kandiafara en Guinée) où m’attend une pirogue pour traverser. Le paysage est splendide !

Panorama de la rivière Kogon entre la Guinée-Bissao et la Guinée #Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée © Gilles Denizot 2017
#Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée © Gilles Denizot 2017

La moto est chargée sur la pirogue et je discute brièvement avec les hommes du coin. Nous partageons des quartiers d’oranges pour nous désaltérer avant d’affronter la suite. Le piroguier comprend rapidement que je veux pagayer moi-même, c’est obligé, sans quoi je ne serais pas réellement un aventurier. Le fonds de la pirogue est recouvert de cette terre boueuse, aux couleurs si belles. Je m’amuse comme un gamin et j’accoste sans encombre (et sans annexer le territoire) sur l’autre rive ; vous en verrez la preuve sur une des photos dans la galerie ci-dessous.

La route n’est pas terminée et les derniers kilomètres seront les plus difficiles. En motocross, le corps se raidit et rend toute secousse plus brutale. Peu avant Boké, voici une autre rivière, le Rio Nuñez, en pleine Guinée maritime. C’est là qu’en 1849, des vaisseaux français et belges firent feu sur des navires anglais et provoquèrent un incident international. L’affaire du Rio Nuñez se poursuivit pendant des années et s’inscrivit dans les prémices du révoltant partage de l’Afrique. En 1866, les Français occupent Boké et installent progressivement leur hégémonie dans l’Ouest du continent.

Le grand pont est bloqué par des camions, il faut donc traverser le fleuve pour rejoindre la ville…

#Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée © Gilles Denizot 2017

De manière pacifique, et à moto, la France est de retour à Boké…

#Off2Africa 51 Bissau Rio Nuñez Guinée
Dimanche 15 janvier 2017


Durant #Off2Africa, j’avais pour habitude de ne partager qu’une photo par jour, sans légende.
Celle du jour figure en haut de ce récit ; en voici d’autres…