#Off2Europe Ohé du bateau
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#Off2Europe — Ohé ! Du bateau !

J’avais juré que je ne voulais plus voyager… Mais comme maintenant on change d’avis comme de chemise, pourquoi ne pas accepter ? O tempora, o mores… Voyons cela comme une expérience insolite, un nouveau défi…


Lundi, j’embarquerai sur le bateau Pollux, le tout premier EXPLORER 54 du chantier Futuna Yachts. 54 pieds, tout en aluminium, pour aller au bout du monde, là où on se sent encore libre, ainsi que le décrit le blog des Favre en mer. #Off2Europe Ohé du bateau

Les Favre en mer, tels qu’ils ont été surnommés, ce sont quatre marins au long cours : Julie, Robin, Hervé et mon amie de toujours, Muriel (dite La Mum’s, que j’ai souvent évoquée ici). Vous apprendrez tout de leur grand voyage, trois ans d’aventures en catamaran et en famille autour du monde, en lisant le livre « Le sillage des Favre en mer : Kangaroo ». Et la Mum’s ne s’arrête pas là : figurez-vous que sa prochaine traversée sera comme skipper du bateau r’Ose Transat, qui emmènera six femmes atteintes du cancer du sein, de l’autre côté de l’Atlantique.

Lundi prochain, donc, je retrouverai Muriel à Amsterdam pour convoyer Pollux jusqu’à Saint-Brieuc. Quelques jours sur l’eau, seuls, avec l’horizon tout autour. Encore mieux que ma terrasse de Tanger ! Ce ne sera pas la première fois que nous naviguerons ensemble, mais jusqu’alors nous nous étions limités au lac Léman. Passons à un niveau supérieur : la mer du Nord et un jour, qui sait, un océan ?

#Off2Europe Ohé du bateau
#Off2Europe © GILLESDENIZOT 2017

Depuis peu, je vogue en solitaire… Ma croisière au long cours a pris l’eau et mon co-équipier a quitté le navire, occasionnant un sentiment d’échec, des attaques de panique et une incrédulité quant aux relations humaines et à l’avenir en général. Échoué à Tanger, dans la maison qui m’avait abrité avant de partir en Amérique du Sud, je retrouve peu à peu mes repères et ai entamé une période No Contact pour « désaimer » et reprendre pied. Je me suis aussi plongé dans l’écriture de Silence NC, un billet quotidien pour voyager dans l’éloignement et exprimer les mots qui hurlent en moi.

Dans cette traversée, Muriel m’a apporté de précieux outils pour garder le cap. Disons qu’à chaque étape importante de ma vie, au moment de tracer l’itinéraire, Muriel a été présente. L’été dernier, je lui avais présenté N. et ce printemps, au cours d’une séance impromptue, elle m’a aidé à comprendre certains aspects de ma personnalité. Car Muriel a ajouté une corde à son arc et est maintenant praticienne en hypnose Ericksonnienne. Je lui avais parlé de mes réactions viscérales face à des situations apparemment anodines qui ont laissé N. perplexe à diverses reprises durant nos neuf mois, qui lui ont suffisamment fait douter de nous pour abandonner l’aventure. Il faut croire que notre engagement était davantage « pour le meilleur que pour le pire. » Bref, je voulais comprendre la raison et éradiquer la cause. De retour dans la grande maison du bord du lac, mais seul cette fois, Muriel m’a fait voyager dans le temps pour identifier les raisons… Ce que j’ai découvert, malheureusement trop tard pour éviter une rupture, m’a soulagé et profondément apaisé. Ensuite, il y a eu la décision unilatérale de la séparation. Là encore, Muriel a partagé avec moi des techniques pour traverser le grain des crises d’angoisse ou en langage marin, un coup de vent brusque et violent, qui ne dure que quelques minutes et disparaît aussi soudainement qu’il apparaît.

Samedi dernier, pour continuer le travail ou tout simplement par amitié fidèle, Muriel me proposait l’aventure à bord de Pollux. Cela fait longtemps que je rêve de l’accompagner et de vivre un peu de ce que j’ai lu dans son livre, en particulier être de quart, seul face à l’horizon. Quand son offre m’est parvenue, j’ai dit oui tout de suite dans ma tête. Puis se sont manifestées les petites voix et toutes les raisons de ne pas s’engager (j’en parlais en Mauritanie). J’ai pensé que ce serait difficile, non pas de naviguer, mais plutôt de me retrouver dans un espace clos, sans possibilité de s’échapper, de devoir gérer les rapports humains alors que je n’aspire qu’à être seul et silencieux, face à ma tristesse. Pourtant, j’ai confiance en Muriel et j’ai donc accepté, un peu comme un patient consent à se laisser interner pour guérir.

Je dis toujours que le hasard n’existe pas : le seul billet bon marché au départ de Tanger était pour… Amsterdam ! Mon ami Frans (auquel j’avais aussi présenté N.) me proposa dans le même temps de venir passer quelques jours chez lui. Nous en profiterons pour aller admirer la mer de tulipes à Keukenhof, le plus grand parc d’exposition floral du monde. Ironie du calendrier, l’arrivée sur les côtes françaises est pressentie pour le 3 mai, exactement deux mois après avoir quitté Buenos Aires. Ces fameux deux mois qu’il nous fallait patienter avant de nous retrouver pour débuter le nouveau chapitre de notre relation : nous installer ensemble en Espagne. Je sais maintenant qu’à cette date, N. ne sera pas au rendez-vous et je me réfugierai seul à Tanger.

Le 1er mars 2019, j’étais heureux, nous partagions un mate face à l’estuaire du Río de la Plata tandis qu’un voilier glissait dans le lointain rose et doux…

Comme dit le capitaine Haddock : « Mille millions de mille milliards de mille sabords de tonnerre de Brest ! »