#HolaMadrid Août adieu
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#HolaMadrid — Août, ou l’adieu

Dernier chapitre #HolaMadrid ! (Contient une dose de Perpignan et beaucoup de Barcelone)


Voici #HolaMadrid — Août, ou l’adieu

#HolaMadrid — Août, ou l’adieu

Me voici arrivé au dernier chapitre #HolaMadrid

C’est un peu à cause de Cervantes que j’aurai écrit cette page de vie dans la capitale espagnole. Comme pour s’en excuser, à mon départ, le bon Miguel tentera encore de me faire croire au Parnasse madrilène. Mais je ne me bats plus contre les moulins à vent : cette ville est hystérique et nous ne nous sommes que peu aimés.

#HolaMadrid — Août, ou l’adieu

Depuis un an, j’attends d’utiliser la photo de couverture pour clore ce chapitre. Trois vieilles dames masquées taillent une bavette, assises sur un banc face au mur dans une rue en pente (position éminemment inconfortable). Ceci dit, j’ai toute une collection de photos de vieux Ibères assis sur leur banc, un peu à la façon Astérix en Corse ; j’ai une grande affection pour ce genre de scènes. J’en réaliserai peut-être un album, un jour. Ces trois vieilles-là ont survécu à la pandémie (souvenez-vous de la mémoire amère), en dépit de la gestion désastreuse d’Ayuso, probablement parce qu’elles ne vivaient pas en résidence pour personnes âgées.

#HolaMadrid — Août, ou l’adieu

Avant de rendre les clefs du coquet studio sous les toits de Lavapiés, je ferai un quatrième petit voyage à Barcelone et un bref aller-retour à Perpignan pour la deuxième dose du vaccin Covid. J’y trouverai le livre de Leïla Slimani, Le pays des autres.

Le bus me déposera à l’Estació Nord et en traversant le parc, j’aperçois une foule autour d’une troupe de comédiens. Le spectacle semble gratuit, je m’attarde et comprend qu’il s’agit du Songe d’une nuit d’été, dans la version catalane de la compagnie Parking Shakespeare. Un an plus tard, je verrai leur nouvelle production Nit de Reis (une nuit des rois façon catwalk race et drag kings, chevelures bleues et strings dorés) dont je parlais en juillet.

Cela devient une tradition, il y aura une visite de Mercedes et nous arpenterons ensemble les librairies, en particulier Altaïr (spécialiste du voyage) où je n’ai pas encore réussi à dépasser la première section, consacrée à Barcelone… Je commence à m’intéresser aux écrivains catalans, notamment Joan Salvat-Papasseit et son poème La casa que vull. Dans la version chantée de Xavier Ribalta, c’est chair de poule assurée !

Salvat-Papasseit, mort à seulement 30 ans, a une plaque commémorative juste au-dessus de ce qui deviendra mon magasin de café, El Magnifico. Alors que j’écris ces lignes, je suis plongé dans la lecture de ses Poemes de mar.

Suivant la recommandation de Mercedes, et en préparation de la Diada, j’irai en apprendre plus sur le Fossar de les Moreres, juste à côté de Santa Maria del Mar. On peut y lire une inscription tirée du poème de Frederic Soler Pitarra, qui rend hommage aux personnes tombées pendant le siège de la guerre de Succession d’Espagne (1714) : 

Al fossar de les moreres 

no s’hi enterra cap traïdor;

fins perdent nostres banderes

serà l’urna de l’honor


Au fossar de les moreres on n’y enterre aucun traître ;
même si nous perdons nos drapeaux, ce sera l’urne de l’honneur

Ces vers font référence à un épisode selon lequel le fossoyeur et son petit-fils refusèrent d’enterrer dans la fosse le cadavre d’un soldat ennemi, bien qu’il fût de leur famille (il s’agissait du fils du fossoyeur, le père de l’enfant). Comme disent les Italiens : si non è vero, è ben trovato.

Après trois semaines dans la capitale catalane, il est temps d’aller tourner la page de la capitale espagnole. En quittant Poblenou, je ne peux ignorer une grande affiche façon Pasticcio Madras et la réminiscence de mon séjour à Conakry, au jour 80 d’#Off2Africa. El eterno navegante va ajouter une nouvelle escale à son voyage… pour combien de temps ?

#HolaMadrid — Août, ou l’adieu

À peine débarqué en gare d’Atocha, je m’arrête au Real Jardín Botánico où est présentée l’exposition Sentir Gaza. Un an plus tard, alors que je rédige ce billet, l’actualité de la région ne s’est pas améliorée, tout comme la condition des femmes à Kaboul (un an aussi), quand la guerre en Ukraine est en passe d’être oubliée… 

Il ne me reste que peu de choses à trier, donner, empaqueter. Je ne resterai à Madrid qu’une courte semaine, du mardi au mardi (pour bénéficier ainsi de deux visites à mon jardin favori…) La veille de mon départ, je ferai une ultime balade dans Lavapiés, noterai la présence de cette Royal Enfield rouge contre la fresque murale, irai saluer mon barbier Marcelo, sauverai de la décharge deux livres de cuisine en espagnol, puis m’attablerai en Place Lara pour un vermouth vespéral. Dernière Noche de Madrid… sans aucun regret, le regard déjà pointé sur la suite.

J’ai rendu les clefs et me retrouve dans la rue, des heures en avance sur mon train. Je dépose mon sac et m’assied, comme les vieux, sur un banc de la rue Embajadores. Il y règne une impression de laisser-aller général, et me voici déjà redevenu touriste dans mon ancien quartier. Un type à l’âge indéfini, au visage marqué par la boisson et le tabac, avale une bière très matinale, adossé à un réverbère. Détail amusant, il porte des sandales de type avarcas minorquines (comme Daniel, à Cairanne) ; j’en dénicherai une paire neuve en octobre à Barcelone. 

Autant se mettre en chemin et faire une dernière halte avant de rejoindre la gare d’Atocha. Il me faut saluer le Real Jardín Botánico, mon havre de paix à Madrid, et partager enfin cette photo :

¡Sí! Adiós, Madrid

Vous prendrez bien encore un petit pastiche (en catalan, dans le texte), non ?

Hola, Barcelona;
hola al teu Poblenou i a la teva mar que sana, inspira gratitud…

#HolaMadrid — Août, ou l’adieu

#LuzParaLaCañada

Le 2 octobre 2020, l’entreprise Naturgy et le Gouvernement de la Communauté de Madrid décident de couper l’électricité à près de 4 000 personnes, dont 1 800 enfants, qui vivent désormais dans l’obscurité. Cela se passe à la Cañada Real Galiana, à 12 kilomètres de la capitale, le long de l’autoroute M50 : le plus grand bidonville d’Europe occidentale.

Vingt-deux mois plus tard, le courant n’est toujours pas rétabli. Il y a un mot pour ça en espagnol : vergüenza.