Silence NC1 Journal de l'éloignement © GILLESDENIZOT 2019
histoires, silence

Silence NC1

Journal de l’éloignement – Quand ce silence aura pris fin, je serai un autre homme…

et dont la page se tourne la nuit.

qui s’écrit le jour

Un journal de l’éloignement


Observer l’eau qui frémit dans la bouilloire, c’est la première image du matin. Saisir le mate que nous avons acheté ensemble à Montevideo. Se souvenir et accomplir tes gestes rituels qui sont devenus les miens, et qui à présent, irrémédiablement, me font penser à nous. Ne pas pouvoir partager ce mate avec toi mais te le dédier.

Aspirer jusqu’à la dernière goutte.

Descendre les escaliers machinalement ; au détour d’une marche, l’angoisse te saute à la gorge. Cette fois, le thème est « Il ne verra pas cette maison, il n’y viendra pas, nous n’y serons pas ensemble, et s’il venait après le silence, et si – ici – nous nous retrouvions ? » Le pouls qui s’emballe…

Alors tu remontes les marches et tu reprends l’écriture, pour lutter contre cette nouvelle attaque d’anxiété.

Écrire, le seul moment où je ne pense à rien sinon aux mots qui tombent sur la page. Écrire un message de remerciement et d’adieu, un dernier message avant le silence. Attendre encore quelques secondes supplémentaires avant d’envoyer.

Déconnecter au soleil, torse nu, la peau qui brûle, les mouettes qui volent et crient, l’incandescence du blanc des murs contre le Bleu de Cæruleum, cet azur de la bannière argentine qui aurait perdu en route son Sol de Mayo (et tous ses rêves avec).

Tendre la main vers le sebsi, le bourrer de kif.
Le fumer pour flotter…